Interview exclusive avec la lauréate du prix Nobel de la paix, Rigoberta Menchú
La lauréate du prix Nobel de la paix et militante des droits des femmes et des peuples autochtones, Rigoberta Menchú, était la principale intervenante de la conférence du CCRE sur l’égalité, la diversité et l’inclusion qui rassemble 500 représentants locaux et régionaux européen.
C’est dans ce cadre que nous avons interviewé cette figure emblématique sur comment bâtir des communtaurés dans lesquelles personne n’est laissée sur compte.
Pourquoi avoir accepté un tel engagement ?
C’est une grande chance d’être présente aujourd’hui car ceux qui participent à cette conférence sont des représentants de collectivités, en lien direct avec la population, l’éducation, la participation citoyenne et surtout avec l’application des concepts d’égalité, de diversité et d’inclusion. Je crois qu’aujourd’hui, le monde a besoin de plateformes extraordinaires pour travailler sur des sujets transcendants tels que le respect de la diversité et de l’inclusion. Ce qui compte, c’est la volonté des citoyens d’intégrer ces valeurs dans leur vie quotidienne.
Votre combat pour la reconnaissance des peuples autochtones d’Amérique est un symbole de la lutte contre toutes formes de discrimination, l’Europe fait face à une vague de populisme et de nationalisme qui ne la met pas à l’abris de phénomène de discrimination. Quels messages pouvez-vous transmettre aux participants de la conférence ?
Tout d’abord, la diversité est notre nature universelle. Nous sommes tous différents. L’affirmation que nous pouvons vivre ensemble dans le respect mutuel, la reconnaissance de l’autre et la coexistence pacifique, est très importante dans le monde actuel. Mais surtout, c’est une richesse que nous devons savoir apprécier. Les peuples autochtones ont vécu dans les lieux les plus inhospitaliers. Mais nous ne sommes pas des victimes, nous sommes des êtres humains qui vivent avec Mère Nature et nous l’apprécions. Je pense que l’Europe, qui compte aujourd’hui des migrants, doit lutter contre les phobies et celles-ci sont nombreuses. Différents types de harcèlements ont également lieu, notamment sur les réseaux sociaux. Il y a beaucoup de négativité. Nous devons rééduquer la population et investir dans notre façon d’éduquer. Il s’agit d’un investissement dans l’éducation qui permet tirer avantage de nos différences et de la complémentarité de chacun.
Les élu(es) participants à la conférence viennent présenter leurs politiques d’intégration des minorités et en faveur de l’égalité. De votre grande expérience, comment faciliter l’inclusion de toutes et tous dans nos sociétés ?
Les objectifs du millénaire étaient très importants, mais leur mise en œuvre l’est encore plus. Je crois que les Nations unies n’ont pas eu les moyens de faire connaître ces objectifs aux citoyens, par le biais des municipalités. C’est dans les municipalités que les gens vivent, qu’ils sont en proie à la violation de leurs droits humains et qu’ils sont tenus responsables de leur propre développement. Ces objectifs nous ont apporté de l’entrain, mais nous ne sommes pas allés au-delà.
Heureusement, dans le domaine des droits des femmes, beaucoup de progrès ont été réalisés. Je crois que l’Espagne est un exemple à ce niveau. L’Espagne compte désormais plus de femmes ministres que d’hommes ? Espérons que cela change la donne et génère un mouvement d’émulation.
En Amérique latine, nous avons réalisé des progrès, notamment en matière de féminicide. Des lois condamnent ceux qui perpétuent les crimes à l’égard des femmes pour le seul fait qu’elles sont des femmes. Mais beaucoup reste à faire. La participation des femmes aux élections est souvent mal considérée. Certaines lois, à l’échelle locale, ont permis d’atteindre la parité. Mais ces lois ne sont pas toujours appliquées. La route est encore longue mais restons optimistes. Le rôle des municipalités est essentiel car beaucoup d’initiatives peuvent y émerger, comme des associations de femmes. Le militantisme des femmes va de pair avec les progrès que nous avons réalisés.