Promouvoir l’égalité malgré la crise : Une conversation avec la Commissaire européenne à l’Égalité Helena Dalli
Le 26 janvier 2021, la première commissaire européenne à l’Égalité, Helena Dalli, a rencontré les élus de la Commission permanente du CCRE pour l’égalité afin de discuter des actions locales et régionales pour faire avancer l’égalité sur le terrain et d’identifier des domaines de coopération future.
La commissaire Dalli a présenté les principaux domaines d’activité de son équipe, en particulier l’impact de la pandémie sur la participation des femmes sur le marché du travail, leur fragilité sociale et économique et la lutte contre la « pandémie de l’ombre », celle des violences contre les femmes et les filles. La pandémie nous rappelle que pour beaucoup de femmes leur représente pas toujours un lieu sûr.
Dalli a déjà appelé les États membres de l’Union européenne à veiller à ce que des mesures soient prises pour soutenir et protéger les victimes de violence sexiste et elle s’est félicitée des efforts déjà mis en place aux niveaux local et régional. « La crise peut être l’occasion de faire les choses différemment et de faire en sorte que la relance de l’Europe se fasse avec une véritable approche égalitaire », a-t-elle déclaré. « Les actions au niveau de l’UE et les actions régionales étant étroitement liées, la coopération doit être renforcée ».
Silvia Baraldi, la nouvelle Présidente de la Commission permanente du CCRE pour l’Égalité, a pleinement approuvé ces déclarations et a souligné que les gouvernements locaux et régionaux, en tant que niveau de gouvernance le plus proche des citoyens, ont une responsabilité partagée dans la mise en œuvre des objectifs mondiaux et européens. Silvia Baraldi a expliqué la mission du Commission permanente en déclarant : « C’est une plateforme permettant aux élus d’échanger sur leur situation et leurs expériences nationales, d’échanger les bonnes pratiques sur l’égalité et de surveiller les politiques de l’UE ».
La session s’est poursuivie avec un échange sur la régression des droits des femmes observée actuellement dans certains États membres ; des liens entre le récent plan d’action de l’UE sur l’égalité des sexes dans l’action extérieure 2021–2025 (GAP III) et sa stratégie en faveur de l’égalité hommes-femmes 2020-2025 ; de la promotion de la participation politique des femmes dans les pays du partenariat oriental ; et bien sûr du genre en période de pandémie de la COVID-19.
Magdalena Czarzyńska-Jachim, maire adjointe de Sopot (Pologne), a déploré les possibilités réduites pour les maires de promouvoir l’égalité des sexes en Pologne en raison de la forte opposition du gouvernement national sur cette question. Le gouvernement national soutient fortement les femmes lorsqu’elles deviennent mères, mais pas lorsqu’il s’agit de retourner au travail ou de s’épanouir individuellement. Cette attitude envers les femmes est observable dans les médias et dans le système éducatif, ainsi que dans la distribution des fonds nationaux et européens.
Magdalena Czarzyńska-Jachim a proposé à la Commission européenne de réfléchir à une distribution décentralisée des fonds européens afin de permettre aux gouvernements locaux de mettre en œuvre des politiques conformes aux valeurs européennes. La commissaire a réagi positivement à cette suggestion et a indiqué qu’elle en discuterait plus en détail avec ses collègues.
Marta Mazurek, conseillère municipale de Poznań (Pologne), a rapporté qu’en février dernier, une résolution du conseil municipal sur l’adoption de la Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale a été abrogée par le gouverneur de la voïvodie (province, dont le gouverneur est nommé par le gouvernement national) affirmant que l’adoption d’une telle résolution n’est pas du ressort du conseil municipal. La situation politique en Pologne et l’exemple de Poznań démontrent les difficultés des collectivités à adopter et à mettre en œuvre efficacement la Charte. Le CCRE et les membres de sa Commission permanente se sont engagés à suivre cette question de près car elle relève des principes d’autonomie et de gouvernance locales.
Marta Mazurek a annoncé qu’elle et ses collègues de l’Association des villes polonaises se battront au sein de leur commission sur les droits humains et l’égalité de traitement pour que les villes polonaises adoptent la Charte européenne. Elle a également demandé son soutien à la commissaire Dalli. La commissaire a fait preuve d’une profonde inquiétude quant à la situation actuelle en Pologne. Elle a été sensible à la situation difficile des gouvernements locaux et s’est engagée à faire tout ce qui est en son pouvoir conformément au mandat conféré par les traités.
Helena Dalli a rappelé les limites des compétences de la Commission européenne et notamment le fait que l’exécutif européen ne peut pas s’immiscer dans les affaires nationales. Cependant, la commissaire a encouragé les membres de la Commission permanente du CCRE de partager leurs préoccupations sur le recul des droits des femmes en Europe et à l’informer de toute situation dans laquelle la Commission européenne pourrait avoir le mandat d’agir.
Le vice-président de la Commission permanente, Emil Broberg, a souligné à quel point la crise de la COVID-19 est liée à l’égalité femme-homme, étant donné son impact différencié sur les deux sexes. Il a demandé que des mesures spécifiques soient prises et que les programmes de relance soient alloués de manière équilibrée entre les sexes. Il a rappelé que les politiques d’austérité se sont révélées néfastes pour les femmes, par exemple dans le secteur public, qui, en réduisant le nombre d’emplois, a eu un impact négatif disproportionné sur les femmes, puisqu’elles sont plus nombreuses à occuper ses postes. « Ces problèmes doivent être résolus au niveau local », a-t-il déclaré.
Pour la commissaire Dalli, le lien entre égalité et relance est essentiel. Le nouveau budget de l’UE continuera à soutenir les projets liés à l’égalité, y compris les organisations de la société civile et les gouvernements locaux et régionaux. « L’égalité doit être au cœur de la réponse à la pandémie, liée également à l’État de droit et au cadre financier pluriannuel », a-t-elle déclaré. La collaboration entre les niveaux européen, local et régional est d’autant plus crucial : « L’effort mutuel doit être poursuivi pour garantir que la réponse au coronavirus soit clairement sensible aux questions liées au genre ».
La réunion s’est conclue sur une note optimiste concernant la prochaine période de programmation de l’UE et le soutien potentiel aux initiatives locales visant à atteindre des objectifs communs d’égalité femme-homme aux niveaux local, régional et européen.
Lien vers l’enregistrement de l’entretien avec la commissaire Dalli : https://youtu.be/WuJH4_tR2R8